Une professeure de l’école La clé des champs, Sylvie Bielli a un projet pour ses élèves de CP : écrire de vraies lettres sur du papier. Une chose presque vintage par les temps qui courent.
Elle trouve en David Brebion, animateur à l‘EPHAD d‘Aubusson, un interlocuteur attentif qui devient un partenaire enthousiaste.
Le projet de correspondance intergénérationnelle est lancé entre 14 élèves de la classe de Sylvie Bielli et 14 résidents,11 à l‘EHPAD St Jean et 3 au Mont, accompagnés par l’équipe d’animation multi site du Centre Hospitalier, pour qu’ils puissent mener eux même cette relation épistolaire.
Apprendre et réapprendre à écrire
Cette correspondance a commencé au mois de février, qui correspond à la période de l‘année scolaire en CP où les enfants peuvent écrire de petites phrases.
Ces écrits réels sont une manière ludique pour les jeunes enfants d‘appréhender l‘écriture. Ils sont heureux de partager et curieux de l‘autre.
Pierre et Tyana en pleine réflexion
Pour l‘équipe d‘animation du Centre Hospitalier, et en particulier David Brebion, la demande de Sylvie Bielli est intervenue dans un contexte approprié.
«Le Centre Hospitalier d‘Aubusson poursuit un projet tri annuel qui définit les orientations principales de l’établissement en matière de propositions sociales, culturelles et de loisir pour les patients et résidents.
L’ouverture à la vie locale, la création de lien social et l’utilisation d’outils de communication constituent une ligne directrice et une priorité dans nos démarches actuelles
Depuis 1 ans, le confinement, les restrictions sanitaires actuelles compliquent énormément les relations sociales. C’est d’autant plus vrai en milieu hospitalier et en EHPAD. Recevoir une gentille intention d’une personne qui vous écrit, impose par la douceur une réponse, remobilise l’esprit, le geste d’écrire, la réflexion d’un contenu adapté.»
Pour les résidents, il s’agit aussi de contribuer à l’apprentissage de l’écriture pour les élèves. C’est très valorisant.
Les résidents ont été choisis en fonction de leur envie de participer et de leurs capacités, motrices et cognitives, de pouvoir le faire.
Des échanges intergénérationnels importants et bénéfiques pour tous
Selon David Brebion «les résidents et patients concernés montrent aussi un grand intérêt pour l’échange avec les enfants. La peur de ne pas être à la hauteur les habite un peu mais elle est fédératrice… il y a beaucoup de similitudes dans les débuts et la fin d’une vie, entre les apprentissages et le maintien des capacités….»
Pour mettre en place cette correspondance, Sylvie Bielli a mis les prénoms des résidents sur des papiers, qui ont été pliés et chaque enfant a pioché pour découvrir son binôme.
Tous les acteurs de cette correspondance intergénérationnel
Melis présente le courrier de Marie-Thérèse
L‘activité se fait en 2 temps: tout d’abord un brouillon est écrit par les enfants selon ce qu‘il veulent dire puis une réécriture au propre a lieu avec Sylvie Bielli, orthographe et mise en page. Et surtout, la lettre est écrite sur du joli papier, parce que les papys et les mamies ont fait de gros efforts pour que leur lettre soit belle.
Chacun écrit sa lettre mais l’échange est permanent autour de Sylvie Bielli
Les petits ont beaucoup d‘idées pour enrichir le courrier, l‘accompagner de dessin et de bonbons « que l‘on met dans un sachet pour qu‘ils ne collent pas à la lettre. Les papys et le mamies, ils sont comme nous, ils aiment les bonbons » explique Melis.
Madeleine correspond avec Eugénie
Eugénie écrit à Madeleine
Les enfants rédigent leur deuxième courrier, en réponse aux lettres des papys et mamies. Cette interaction les oblige à répondre aux questions et à enrichir leur vocabulaire. «…aimer manger une glace c‘est bien, mais si elle est à la fraise, c‘est meilleur!»
Aucun des enfants de la classe de Sylvie Bielli n‘écrit à ses grands parents.« On leur parle au téléphone, on les voie pour les vacances ou ils habitent à côté alors ça ne sert à rien d‘écrire…»
Pour les résidents, cet échange de courrier est une vraie bulle d‘oxygène. Depuis plus d’un an, les activités extérieures ne sont plus possibles, il n’y plus d’échange. Les animations étaient tournées vers l’extérieur, vers des partenaires, d’autres EHPAD, l’ADAPEI, la Métive…
Claude est le papy épistolaire d’Olivia
Pour David Brebion, « Cette lettre, c’est mobiliser sur une réalité non médicale, c’est un lien vers un être humain avec qui on est interactif.»
Les enfants sont en période d’apprentissage là où les résidents sont dans une phase de conservation des acquis. La plupart ont des difficultés motrices mais on trouve des alternatives.
Papy Denis écrit avec son ordinateur parce que tenir un stylo ne lui est plus possible.
La situation sanitaire, avec ses contraintes, a bouleversé la vie de chacun. Elle a donné encore plus d’importance à cet échange de courrier mais elle ne devrait pas permettre aux enfants et aux papys et mamies de se rencontrer « en vrai ».